6 mois de démarches pour se marier

N et H se rencontrent il y a 2 ans dans leur pays, la Tunisie. H, ingénieur, décroche un emploi en Belgique dans un bureau d’étude renommé. Ce peut être une double aubaine car dans leurs pays, deux hommes n’ont pas le droit de se marier. Ils s’installent en Belgique et déposent comme il se doit une demande de mariage dans leur commune de résidence. Dans la foulée, le visa Schengen de N. – obtenu grâce à son poste de Directeur financier – expire. Ayant mis fin à son contrat de travail, le visa n’est pas renouvelé et sans visa, il lui est interdit de travailler…

L’un des deux partenaires ayant ainsi perdu son titre de séjour, la commune estime devoir lancer une enquête au Parquet du Procureur du Roi afin de vérifier s’il n’y a pas volonté de fraude, de « mariage blanc ». Ils restent tous deux confiants car les employés de l’Etat Civil autant que de la police ont toujours été professionnels. Le couple n’a encore jamais ressenti d’homophobie et se sent respecté. Et l’enquête se passe effectivement très bien.

Et puis, le couac. Un courrier de l’Office des Etrangers l’interroge sur les raisons de sa présence sur le territoire. Pourquoi ne pourrait-il pas légalement rentrer en Tunisie pour y demander un visa pour mariage en Belgique et revenir après l’avoir obtenu ?

Pourquoi ?

Parce qu’en Tunisie nous dit N. « l’homosexualité est sans doute la pire des choses ». Cette autorisation de mariage, il ne peut en aucun cas l’obtenir chez lui. Pire. Les risques d’arrestation, de tests physiques humiliants, de viol et de prison sont élevés. N. y a d’ailleurs déjà été menacé et frappé par un policier. L’administration belge semble l’ignorer et leur propose donc cette solution comme réaliste.  

Le couple sait par ailleurs que ce questionnaire de l’Office des Etrangers est une procédure pour montrer que l’institution travaille au cas par cas, mais que très bientôt il recevra un ordre de quitter le territoire. Il le reçoit effectivement, et c’est un choc. Pourtant, la procédure de demande de mariage protège N. En effet, jusqu’à la réponse de la commune à la demande de mariage, N. a le droit de vivre légalement en Belgique. L’administration belge, par deux biais, lui signifie deux ordres opposés. Lequel suivre ? En insécurité totale, N. décide de ne pas rentrer en Tunisie. Ce fut le début de plusieurs semaines d’anxiété extrême, d’insomnies, de troubles émotionnels ayant eu des répercussions physiques.

Qui ont pris fin le jour où le Bourgmestre a accepté de les marier. Et nous sommes ravis pour eux.

Autant d’obstacles, ce n’est pas inhabituel. Amoureux Vos Papiers est témoin de cela au quotidien.  Et ce n’est pas terminé, puisque N. a perdu son droit de vivre sur le territoire belge, lié à la procédure de mariage. N’est-ce pas ironique ? Maintenant qu’on leur a permis de se lier par la loi, N. n’a plus le droit de vivre ici. Seule la procédure suivante le mettra à l’abri administrativement jusqu’à la prochaine décision. Le choix entre le regroupement familial ou la demande d’asile est cornélien. Mais c’est encore une autre histoire…

 

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« Les annexes et les articles mentionnés sont issues de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers qui a été publiée au Moniteur belge le 31 décembre 1980 et est entrée en vigueur le 1er juillet 1981″